- Actualités Vaudoises - Olivier Rau
L’employeur doit payer une partie des primes maladie !

Rédactrice
C’est en tout cas ce que propose le Conseil d’Etat, jamais à court d’idées lorsqu’il s’agit de plomber la compétitivité des entreprises vaudoises.
Une bien mauvaise habitude
Alors que les prélèvements salariaux sont déjà chez nous les plus élevés de Suisse, le Conseil d’Etat fait régulièrement des propositions pour alourdir encore la charge et creuser l’écart. L’année dernière, c’était une augmentation des cotisations du monde du travail au régime des prestations complémentaires pour les familles, validée à une très large majorité par le Grand Conseil. Elle prendra effet au 1er janvier 2026, avec alors, pour les entreprises et les salariés, une ponction supplémentaire sur les fiches de salaire et le passage de 0,06% à 0,09% du taux de cotisation.
Avec les nouvelles fortes turbulences traversées en 2025 par le monde économique, on aurait pu espérer cette fois une certaine retenue, à en croire les grandes déclarations des autorités depuis quelques mois. C’est hélas le contraire qui est en train de se produire, avec une proposition tout bonnement ahurissante faite dans le cadre de l’exposé des motifs et projet de budget de l’Etat pour 2026 publié la semaine dernière. Elle consiste à demander aux employeurs de «réduire la charge liée aux primes d’assurance-maladie pour les enfants»!
Concrètement, le Conseil d’Etat prévoit le versement chaque mois dès le 1er janvier 2026 d’un supplément de CHF 40.– aux allocations familiales pour enfants (dont le montant est actuellement de CHF 322.–) «afin de réduire la charge liée aux primes d’assurance-maladie obligatoire des soins». Ce n’est pas un cadeau pour les bénéficiaires de subsides, qui toucheront finalement exactement la même chose. En effet, il sera tenu compte de ces CHF 40.– dans le calcul du droit au subside. C’est en revanche un joli cadeau pour toutes celles et ceux qui ne sont pas subsidiés, cadeau fait par le Conseil d’Etat avec l’argent des employeurs, dont on rappelle qu’ils financent seuls le régime des allocations familiales.
« Ce n’est pas un cadeau pour les bénéficiaires de subsides, qui toucheront finalement exactement la même chose. »
CHF 90 millions à charge des entreprises vaudoises
Pour se rendre vraiment compte de l’ampleur du cadeau, comme les documents officiels n’en disent rien, il faut voir combien il y a d’allocations pour enfants versées dans le canton. Selon la dernière statistique fédérale officielle, il y en avait 180’550 en 2023. Si l’on multiplie ce nombre par CHF 40.– et par 12 pour avoir le résultat annuel, on arrive à une somme rondelette de près de CHF 90 millions (CHF 86’664’000.– pour être précis, chiffres 2023 toujours). Cela correspond à un prélèvement supplémentaire de l’ordre de 0,25% de la masse salariale, à charge des employeurs. Ils apprécieront.
On ose espérer que la Commission des finances, puis cas échéant le Grand Conseil, auront la sagesse de mettre le holà. Sinon la justice devra être saisie, puisque, cerise sur le gâteau, la proposition gouvernementale est pour le moins problématique du point de vue du respect du droit fédéral, lequel ne prévoit pas, dans la liste exhaustive des types d’allocations, de prestation de réduction de charge des primes d’assurance maladie. Il indique par ailleurs expressément que «toute autre prestation est réglée et financée en dehors du régime des allocations familiales».
A partir de 2027, le Conseil d’Etat, qui a de la suite dans les idées, prévoit de remplacer les CHF 40.– par un versement dans un nouveau fonds de surcompensation, reversé ensuite aux assureurs maladie «en tant que participation de l’employeur aux primes des enfants, ce qui permettra de diminuer d’autant le montant des primes facturées et les subsides correspondants».
Le plus navrant dans toute cette affaire est probablement que de tels projets et intentions émanent d’un gouvernement à majorité de centre-droite.

Le Grand Conseil a transmis au Conseil d’Etat une interpellation d’Alexandre Berthoud interrogeant l’exécutif sur la mise en oeuvre de l’imposition minimale GloBE. Pour mémoire, il s’agit de l’imposition à un taux d’au moins 15% des bénéfices des groupes d’entreprises internationaux dont le chiffre d’affaires annuel dépasse 750 millions d’euros.
Le Conseil d’Etat devra préciser s’il a déjà entrepris une analyse comparative des mesures mises en oeuvre par les autres cantons dans le cadre de l’introduction de l’imposition minimale ou l‘envisage, et, le cas échéant, s’il peut en communiquer les résultats. À défaut, il est invité à indiquer s’il compte réaliser une telle étude afin d’identifier les bonnes pratiques et d’évaluer la position du Canton de Vaud dans ce nouveau contexte fiscal international. Enfin, le Conseil d’Etat devra se prononcer sur les effets potentiels de cette réforme sur l’attractivité économique du canton et présenter les éventuelles mesures d’accompagnement qu’il entend mettre en place.
Une démarche bienvenue pour accompagner sereinement ce tournant fiscal important pour l’attractivité du canton.

Rédacteur responsable, , secrétaire général adjoint – FPV