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Fiscalité des personnes physiques: pour une véritable réforme!

Jean-Blaise Roggen
Rédacteur

Après plusieurs péripéties, dont une nouvelle proposition faite in extremis par le Conseil d’Etat juste avant le début des travaux au Grand Conseil, l’idée d’une baisse de la fiscalité des personnes physiques dès le 1er janvier prochain fait enfin son chemin, à petits pas, mais hélas à coup de demi-mesures seulement.

En date du 3 juillet dernier, le Conseil d’Etat proposait une baisse du taux de base de l’impôt sur le revenu des personnes physiques de 2,5% à partir de 2024, avec à la clé un impact budgétaire de l’ordre de 75 millions de francs.

Et l’impôt sur la fortune?

L’impôt sur la fortune est le grand oublié de ces propositions, alors que, dans le même temps, d’autres cantons, à l’image de Genève, réduisent substantiellement la fiscalité du patrimoine. Cette timide proposition initiale est d’autant plus incompréhensible qu’au fil des années, la dette publique vaudoise (presque totalement effacée) a laissé place à des réserves estimées entre 5 et 6,5 milliards, au fil des écritures de bouclement du Conseil d’Etat depuis plus d’une quinzaine d’années. Quant aux comptes 2022, il y a une nouvelle fois près de 500 millions de francs d’excédents avant écritures de bouclement.

Alors que la Commission des finances du Grand Conseil osait un amendement en portant à 4,5% au lieu de 2,5% la réduction de l’impôt sur le revenu (avec en conséquence un impact budgétaire de 130 millions), le Conseil d’Etat – coup de théâtre ! – a in extremis développé une contre-proposition le 21 septembre, prévoyant une baisse de l’impôt sur le revenu de 3,5% en 2024 (105 millions) et de 1,5% supplémentaire, mais au conditionnel, en 2025 (45 millions).

Ce chassé-croisé de propositions bien timides, quoi qu’il en résulte dans son épilogue devant le plénum, rate son but de manière évidente. En effet, quelle que soit la solution retenue, le canton de Vaud restera encore dans les tréfonds du classement en termes de charge fiscale en comparaison intercantonale.

«Il est grand temps de procéder à une vraie baisse d’impôt qui dépasse le stade symbolique ou homéopathique.»

Vaud avant-dernier de la classe à l’échelle suisse

Pour illustrer cela et parmi beaucoup d’études similaires, Credit Suisse, dans son «Tax Monitor» paru en juin et établissant un tableau comparatif de la charge fiscale par canton, rend un verdict sans appel. Cette étude compare la charge fiscale (fédérale, cantonale et communale) exprimée en pourcentage du revenu brut ou de la fortune brute, pour les différentes catégories de ménages-type (époux en ménage commun, célibataires, avec ou sans enfants, etc.) et pour différentes catégories de revenus imposables. Le tableau consolidé final établit une moyenne pondérée nationale de charge fiscale sur le revenu et la fortune (base 100%) autour de laquelle gravitent les différents cantons. Pour y trouver le nôtre, il faut descendre à l’avant dernière place entre Berne et la lanterne rouge, Neuchâtel, et ainsi appréhender à sa juste mesure le marasme dans lequel se trouve le contribuable vaudois. Celui-ci s’acquitte d’une charge fiscale de l’ordre de 122,3% de la moyenne nationale, soit près de 10 points de plus que le canton le précédant directement Berne (112,7%).

Seule l’initiative…

Notre canton obtient ainsi un score calamiteux pour les personnes physiques, largement dépassé par des cantons comme Genève, Bâle ou Zurich, qui sont nos concurrents directs et qui ne sont pas précisément connus pour être des paradis fiscaux… Compte tenu des marges budgétaires importantes dont il bénéficie (contrairement aux cantons précités, notamment Genève), cette ponction fiscale est aussi intolérable qu’injuste pour les contribuables vaudois qui sont à l’origine même de ces marges budgétaires substantielles. Tout cela confirme qu’il est grand temps de procéder à une vraie baisse d’impôt qui dépasse le stade symbolique ou homéopathique. L’urgence est là et c’est une véritable réforme de grande ampleur que réclament les citoyens-contribuables. A ce titre, l’initiative «Baisse d’impôt pour tous», qui prévoit une baisse linéaire sur le revenu et la fortune de 12% sur le montant total de l’impôt (taux de base et coefficient annuel) pour chaque contribuable, constitue la seule voie capable de nous faire quitter les abysses du classement intercantonal de la pression fiscale. Déposée ce printemps avec plus de 28’000 signatures valables, elle doit être soumise au plus vite au scrutin populaire. Elle constitue la réponse simple, équitable, équilibrée, pérenne et modérée à l’urgence.

Dans cette rubrique, on traite des idées. Si possibles des grandes, celles qui viennent aux députés du Grand Conseil vaudois. Mais pour cette fois, pas d’idée. Parce qu’on a lu le rapport de la Cour des comptes et qu’on se dit qu’on n’a pas idée de verser des montants pareils sans savoir à quoi ils servent.


Rembobinons. La Cour des comptes, autorité indépendante, a pour mission de contrôler l’utilisation de l’argent public. Elle vient de publier un rapport sur les prestations d’intérêt général (PIG) : il s’agit de prestations commandées aux hôpitaux et financées par le Canton, à hauteur de 490 millions par année. On y apprend avec stupeur que 150 millions (dont 130 pour le seul CHUV) sont octroyés sans affectation connue. On ne sait tout simplement pas comment ils sont utilisés. Sans parler des problèmes soulevés en matière de gouvernance, de bases légales, de critères d’attribution…


Réaction immédiate du Grand Conseil, puisque 36 députés ont signé l’interpellation de leur collègue Fabrice Moscheni demandant des explications au Conseil d’Etat. Finalement, en voilà une bonne idée !

Baptiste Müller
Rédacteur responsable



Jean-Blaise Roggen,
Responsable politique Finances et fiscalité

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