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Présentation du budget 2026 de l’Etat de Vaud: un exercice plus politique que véritablement budgétaire

Jean-Blaise Roggen
Rédacteur

Présent «in corpore», le Conseil d’Etat voulait manifestement communiquer au-delà de la sphère étroite de la gestion courante des finances publiques et rappeler en filigrane les enjeux politiques à venir avec, en ombre portée, l’initiative «Baisse d’impôts pour tous».

Même s’il est présomptueux pour ses initiants de prétendre occuper une large part des pensées de notre gouvernement on ne peut s’empêcher de le supposer en considérant les mots choisis, la version des faits adoptée et les méthodes appliquées.

Les mots d’abord: comment parler de «situation financière qui se dégrade» en finances publiques quand les revenus augmentent de 3% et les recettes fiscales de 2,6%? Rappelons dans le même temps que la croissance du PIB dans notre pays est prévue à 0,9% par le KOF; dès lors les recettes fiscales et les revenus de l’Etat de Vaud ne peuvent être qualifiés que de florissants en comparaison nationale et internationale. Saluons l’effort des contribuables de ce Canton qui permettent ce confort sur le plan des prélèvements obligatoires (notons au passage une hausse des prélèvements au titre des prestations complémentaires famille en 2026). Alors où le bât blesse-t-il? La hausse encore plus importante des dépenses (et donc, mécaniquement, du poids de l’Etat dans l’économie vaudoise) est passée par là: en effet elles augmenteront de 3,6% en 2026. On constate notamment une hausse sensible des charges d’amortissement et de transfert. Dans ces conditions comment oser prétendre, devant les Vaudoises et les Vaudois, à une quelconque «maîtrise des charges» comme le fait le Conseil d’Etat? Soulignons que la croissance démographique mise en avant par ce dernier pour les justifier laisse perplexe puisqu’elle était d’à peine 1,1% en 2024 (derniers chiffres disponibles) et qu’elle vaut aussi, «mutatis mutandis» pour la hausse des recettes fiscales. Dans le même temps les investissements se maintiendront à des niveaux historiquement élevés à hauteur de 1,1 milliard de francs. Toutefois l’histoire récente des finances publiques nous enseigne que les grands efforts d’équilibre budgétaire (dans le Canton de Vaud, sous l’ère Broulis, et en Allemagne notamment) ont tous porté non seulement sur les charges mais aussi sur la réduction temporaire des investissements. Néanmoins (pour bien démontrer le rôle «maléfique» de toute initiative sur la baisse de la fiscalité?) le Conseil d’Etat préfère économiser sur les dépenses uniquement; objectif louable en soi, à condition bien sûr de ne pas tomber dans le symbolique (réduction du nombre de poubelles dans les gymnases) ou le hors sujet (mesures drastiques envers les pôles hospitaliers régionaux). Par ailleurs les Vaudoises et les Vaudois aimeraient en apprendre un peu plus sur la nature exacte des écritures de régularisation, sur la politique d’activation au bilan et sur les «risques» transmués en dépenses selon les très flexibles normes comptables MCH 2 «à la vaudoise». Le compte de résultat du Canton serait-il moins chargé de dépenses si on adoptait les rigoureuses normes IPSAS comme Genève, Bâle ou Zurich? Dans le même registre, quid des garanties assumées comptablement par l’Etat de Vaud? On peut légitimement se poser un certain nombre de questions sur les choix comptables opérés.

« Les recettes fiscales et les revenus de l’Etat de Vaud ne peuvent être qualifiés que de florissants en comparaison nationale et internationale.»

Il semble enfin que l’Etat de Vaud souhaite, si l’on comprend bien et par une modification législative ad-hoc, utiliser les réserves accumulées dans les comptes au fil des ans pour mieux atteindre ses objectifs financiers. Ces réserves accumulées appartiennent aux Vaudoises et aux Vaudois. Elles ne peuvent pas servir à éponger des déficits apparents ou réels pour lesquels un effort gouvernemental sur les dépenses et les investissements doit primer. On ne peut pas décemment faire perdre ainsi aux citoyens vaudois le fruit de leurs efforts fiscaux sur des décennies!

Avant qu’on finisse par dilapider complètement leurs sacrifices passés, ils méritent plus que jamais une vraie baisse d’impôts!




Jean-Blaise Roggen,
Responsable politique Finances et fiscalité

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