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- Finances et fiscalité - Jean-Blaise Roggen

L’imposition du couple: un serpent de mer qui a quitté les grands fonds

Depuis un arrêt de principe qui remonte à une quarantaine d’années déjà (arrêt «Hegetschweiler», ATF 110 Ia 7) le Tribunal fédéral a fixé les grandes lignes de l’égalité fiscale entre époux et concubins en établissant les principes suivants :

• A revenus égaux, un couple doit payer moins d’impôt qu’un célibataire.

• A revenus égaux, les couples doivent supporter une charge fiscale semblable, quelles que soient la distribution des rôles entre les époux et l’origine de leurs revenus.

• La charge fiscale des couples mariés ne doit pas être plus élevée que celle de concubins disposant chacun de la moitié des revenus.

Sur cette base, les cantons ont rapidement fait leur part du travail en établissant, de manière simple et efficace, des mécanismes de mise en œuvre de ces principes comme le splitting ou le quotient familial. Ces outils sont tous basés sur la mitigation de la progressivité des taux, qui est le nœud gordien du problème pour les couples mariés. En effet, comme leurs revenus s’additionnent, ils grimpent irrémédiablement dans le barème des taux d’imposition.

Au niveau fédéral, par contre, la procrastination a longtemps prévalu. Mais après sa longue relégation dans les abysses, la question a récemment ressurgi avec la simpliste et rudimentaire solution de l’imposition individuelle (portée par une initiative populaire ; ainsi, marié ou non, un couple devrait être imposé comme s’il n’existait pas et chaque conjoint et concubin remplir sa propre déclaration d’impôt. Or, si ce schéma satisfait la dernière condition établie par le Tribunal fédéral, il s’assied allègrement sur les deux autres tout en surchargeant l’administration de 1,8 million de déclarations fiscales supplémentaires.

Fort de ce constat sur la création de nouvelles inégalités en cherchant désespérément à en résorber d’autres, le Centre a lancé une initiative populaire pleine de bon sens qui vise à établir une vraie équité entre couples mariés et concubins; elle se fonde sur le calcul alternatif d’impôt. Selon ce schéma, parallèlement au calcul de l’imposition commune des époux, un calcul alternatif est effectué sur la base des barèmes et des déductions applicables aux personnes non mariées. Finalement, seul le plus faible des deux montants d’impôt calculés est pris en compte. C’est une solution à la fois simple (une seule déclaration par couple marié) et équitable qui satisfait aux objectifs initiaux établis par notre Haute Cour. Quand le bon sens affronte l’esprit de système on aurait bien tort de laisser les coudées franches à ce dernier…



Jean-Blaise Roggen,
Responsable politique Finances et fiscalité

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